Rétrospective de one-shot : Doctor Who
Aujourd’hui, on change d’ambiance. Y a pas longtemps j’ai enfin fait jouer Doctor Who
(il traînait depuis six mois sur mon étagère) avec de vrais gens autour d’une
vraie table. Et, alors MJ Grottard, comment ça s’est passé ?
Mais bref, parlons du jeu. Je ne vais pas faire une critique du jeu, mais me concentrer sur deux points très importants selon moi :
Certains réussissent à trouver une combine pour se libérer avant qu’ils ne se fassent disséquer et sauvent leurs compagnons. Les enfants reculent, le professeur insiste. Une lutte a lieu entre Psi et le professeur : Psi se prend des coups de canne, mais arrache les vêtements du professeur, révélant… un robot. Ils parviennent à le désactiver. Ils analysent les lieux, derrière une sorte de placard, l’espace. Le vide intersidéral. Oups, un professeur y avait jeté un gosse récalcitrant… Les enfants viennent de Paris, 2019. Mais ne savent pas ce qu’ils font là. Ils apprennent des sciences très avancées.
Apparemment, l’air est saturé d’un élément chimique qui attaque l’œil. Ils trouvent une seule dose d’antidote sur le professeur désactivé que Jenny récupère. Elle part en éclaireur à l’extérieur, à la recherche d’autres doses, mais tombe sur un ordinateur (qu’elle ne peut pas utiliser, elle est du XVIIe siècle, rappelez-vous) et doit battre en retraite à cause de patrouilles de « professeurs ».
Psi se connecte à l’ordinateur et essaie de contrôler les lumières pour empêcher l’ange d’agir. Pendant ce temps, de l’autre côté de la pièce, la porte se fait ouvrir par une scie à métal… Le groupe parvient à bloquer l’ange mais il y a des blessés (seulement des blessés, ouf !).
Dans son livre Dirty MJ 2, John Wick parle de la situation et propose que quand l'un des joueurs sort son téléphone, il s'arrête de parler et le regarde fixement, en silence, jusqu'à ce qu'il le range. Il reprend alors le cours du jeu sans faire le moindre commentaire.
J'aime cette idée. On est (normalement) des adultes responsables, pas besoin de confisquer les portables à l'entrée.
Doctor Who en quelques mots
Avant de vous parler de la séance en elle-même, parlons
rapidement du jeu. Parce qu’il n’y a plus besoin de présenter la série, n’est-ce
pas ? Comment ça tu ne l’as pas vu ? Hé bien mon cher Boris, tu vas
me faire le plaisir d’aller voir ça tout de suite, c’est vachement bien.
Bon, pour les petits Boris récalcitrants dans ton genre, qui
ne voulent pas s’enfiler 11 saisons d’une série juste pour lire un article (c'est scandaleux Boris, sache-le),
Doctor Who c’est de la science-fiction (mais pas que) où un extra-terrestre
a une machine à voyager dans le temps et l’espace : il peut t’emmener où tu
veux et quand tu veux. Si ça, ça ne donne pas envie, et ben…
Mais bref, parlons du jeu. Je ne vais pas faire une critique du jeu, mais me concentrer sur deux points très importants selon moi :
- Chaque personnage a des « points d’Histoire ».
Il peut les dépenser pour obtenir des bonus divers, voire changer un élément du
scénario. Par exemple : « Joueur : J’aimerai qu’il y ait une
échelle ici pour nous permettre de nous enfuir !
- MJ : Ok, ça te demande deux points d’Histoire. »
C’est totalement génial et terrifiant en tant que MJ, les joueurs t’apportent des idées sur un plateau mais adieu contrôle du scénario ! Pour un dirigiste tel que moi, le choc est rude.
- Le jeu n’aime pas la violence. Elle est
possible, évidemment, mais tout le système est conçu pour éviter les
confrontations. Il y a même plusieurs pages dans le livre qui expliquent quoi faire d'autre que se bagarrer ! Déjà, les joueurs n’ont pas vraiment de points de vie. On peut
mesurer leurs blessures, certes, mais le jeu te dira juste « Ca va
vachement mal », jamais « à tel score, le personnage est mort ».
Tout dépend du MJ.
Également, l’ordre d’initiative dans les « combats » est fixé selon les actions entreprises : d’abord ceux qui parlent, ensuite ceux qui bougent, puis ceux qui font des trucs, et enfin ceux qui combattent. Le temps d’arriver au dernier point, quelqu’un d’autre aura peut-être trouvé une solution.
La séance en quelques mots
Hahahaha, d’où je vais résumer le scénario en quelques mots,
vous me connaissez maintenant. Non mais en vrai, pour comprendre la partie
critique qui suit, j’ai besoin de résumer la séance.
J’ai fait jouer des pré-tirés : une équipe très
hétéroclite composée du Docteur, de Clara (une jeune femme de notre époque), de
Jenny (une alliée, bretteuse du XVIIe siècle) et Psi (un trans-humain qui a une
puce pour se connecter à n’importe quel ordinateur). Hétéroclite, j’ai dit, oui. Rien
de choquant dans cet univers.
Bref, tout ce beau monde se baladait à bord du TARDIS (le
vaisseau spatio-temporel) quand problème, bug et… Ils se réveillent attachés,
dans une boîte en plexiglas, et il y a un scalpel mécanique qui vise juste entre
leurs deux yeux. Ils ne voient pas leurs compagnons, mais trois autres boîtes
similaires avec des lézards humanoïdes dedans. Ils sont dans une salle de
classe de 2019 avec des enfants de 2019 mais menée un professeur habillé pour un bal de
la Renaissance et portant un masque vénitien. Sur le tableau il note : « Aujourd’hui
dissection des gasosaures, lézards
qui ne sentent pas la douleur ». Ambiance.
Certains réussissent à trouver une combine pour se libérer avant qu’ils ne se fassent disséquer et sauvent leurs compagnons. Les enfants reculent, le professeur insiste. Une lutte a lieu entre Psi et le professeur : Psi se prend des coups de canne, mais arrache les vêtements du professeur, révélant… un robot. Ils parviennent à le désactiver. Ils analysent les lieux, derrière une sorte de placard, l’espace. Le vide intersidéral. Oups, un professeur y avait jeté un gosse récalcitrant… Les enfants viennent de Paris, 2019. Mais ne savent pas ce qu’ils font là. Ils apprennent des sciences très avancées.
Pendant leur enquête, le groupe a mal aux yeux, ils pleurent
puis deviennent carrément aveugles.
Apparemment, l’air est saturé d’un élément chimique qui attaque l’œil. Ils trouvent une seule dose d’antidote sur le professeur désactivé que Jenny récupère. Elle part en éclaireur à l’extérieur, à la recherche d’autres doses, mais tombe sur un ordinateur (qu’elle ne peut pas utiliser, elle est du XVIIe siècle, rappelez-vous) et doit battre en retraite à cause de patrouilles de « professeurs ».
Elle revient et guide les autres vers l’ordinateur, Psi s’y
connecte et apprend qu’ils sont effectivement sur un vaisseau spatial et relève
des incohérences de date système : apparemment le vaisseau date du XXIIe
siècle, mais les enfants viennent de 2019… Repérés par des professeurs, le
Docteur parvient à ouvrir une cuve de plasma, forçant tout le monde à s’enfuir.
Ils arrivent dans une pièce sombre et froide, avec quelques
lumières clignotantes. Un nouvel ordinateur et aussi… un ange pleureur. Mes joueurs qui connaissaient la série :
Psi se connecte à l’ordinateur et essaie de contrôler les lumières pour empêcher l’ange d’agir. Pendant ce temps, de l’autre côté de la pièce, la porte se fait ouvrir par une scie à métal… Le groupe parvient à bloquer l’ange mais il y a des blessés (seulement des blessés, ouf !).
L’autre porte explose et un groupe de soldats indiens du
XXIIe siècle rentrent en trombe. Ils forcent le groupe à les suivre et manquent
d’emmener l’ange si le groupe ne serait parvenu à les convaincre. Les soldats
leur donne à tous des antidotes et ils retrouvent la vue. Apparemment le
vaisseau est en orbite au-dessus de l’Inde du XXIIe siècle et ils sont venus
enquêter.
Le groupe parle avec l’hologramme du commandant indien,
quand l’hologramme se fait « angéliser ». Psi arrive à couper la
communication à temps. Au même instant, des hordes de professeurs tombent du
plafond et submergent les soldats. Le groupe s’engouffre dans la navette des
indiens et sauvent autant de personnes que possible. Les indiens les emmènent
vers la source d’énergie (qu’ils pensent être le TARDIS), mais ils doivent
sauter dans l’espace pour retourner au vaisseau.
Une fois re-rentrés, ils arrivent à la source d’énergie :
le moteur du vaisseau. Celui-ci, détourné par les anges, fait des bonds brutaux
dans le passé et les anges se nourrissent de l’énergie dégagée. Dans la pièce,
le groupe voit une brèche temporelle, la prochaine destination : Paris
2019, d’où viennent les enfants. Dans un coin de la pièce, le TARDIS. Plusieurs
anges festoient autour du moteur et sont amorphes. Mais un ange qui a fusionné
avec un robot reste alerte et défie le groupe.
L’affrontement est terrible et le Docteur et Psi sont mis
K.O. par l’ange-robot pendant que les autres s’occupent du moteur et doivent
gérer les autres anges. Ils trouvent un moyen pour faire tomber le moteur plus
bas, obligent les anges à se regarder mutuellement, ce qui les met hors d’état
de nuire. Brutalement réveillé par un coéquipier, le Docteur utilise son
tournevis sonique pour prendre le contrôle d’un morceau de l’ange-robot et le
jette contre le moteur, qui entre en surchauffe. Le groupe fuit avec le TARDIS.
Conclusion : les enfants sont morts (ben oui), les
Indiens sûrement s’ils n’ont pas pu partir assez loin, mais Paris est sauvé.
Et alors, comment on l’a ressenti cette séance ?
Vas donc te faire fouetter ! Oui, maître…
C’était affreusement laborieux… Cela fait longtemps que je ne
n’avais pas maîtrisé « en vrai », c’était le test d’un nouveau
système, ce n’était pas mon scénario et j’avais des novices à ma table. Commençons donc par…
Le système
Le système est franchement cool et flexible, pas eu de souci
à ce niveau-là. J’ai eu de petits problèmes dans les combats avec l’initiative par
contre. Vous vous souvenez au début de l’article que ça dépend de ce que vous
faites ? Parler / Bouger / Faire / Combattre.
Le livre indique de demander à chaque phase si quelqu’un
veut agir. En gros, tout le monde agit, puis nouveau tour. Alors que je
demandais « Quelqu’un veut dire quelque chose ? » on me répond « Je
le tranche en deux ! » « Je dévisse le moteur ! ». Ce
qui avait le don de me perdre prodigieusement… Une alternative aurait été de
demander au début de chaque tour qui veut faire quoi mais c’est chronophage, et
ça casse l’action.
Non, le vrai souci pour moi, et c’est ma faute, ce sont les
traits. Chaque personnage a plusieurs traits particuliers qui lui donnent des
bonus, sauf le Docteur qui doit bien en avoir une quinzaine. Ils ont choisi un pré-tiré parmi une dizaine et je n’ai regardé les traits de personne, je voulais
tester le « cœur » du système. Sauf que du coup tout le monde
utilisait ses traits à tort et à travers dès qu’ils voyaient la moindre
relation entre leur action et ce qui était noté sur leur fiche. Ils avaient
raison de le faire, évidemment. J’aurai dû soit expliquer chaque trait au
départ, soit juste dire « On joue sans les traits pour cette fois ».
Mais je ne l’ai pas fait et ça a considérablement ralenti le rythme.
Le scénario
Ahhhhhhhhhhhhh, je vais pouvoir casser du sucre sur autre
chose que moi-même pour une fois. Le scénéar’. Ce scénario était fourni dans le
livre, avec plusieurs autres plus volumineux, voire carrément des petites campagnes. Pour
ce one-shot, j’ai pris ce scénario qui semblait bien s’y prêter niveau
longueur.
Tout d’abord… Le scénario était linéaire. Pour aller du
point de départ à la fin, il fallait suivre le chemin du scénario, avec quelques
aménagements à la marge. Ce n’est pas un mal, c’est même bien pour un one-shot,
où on doit rester concentré. De plus, le scénario donnait tout de même de
bonnes raisons d’avancer dans cette direction.
Néanmoins, dans un jeu où pour quelques points d’Histoire on
peut modifier un élément plus ou moins majeur, les restrictions d’un scénario
linéaire sont vite caduques. Le groupe aveugle devait à la base suivre les
enfants, mais non, une seringue a été trouvée sur le professeur ! Etc.
Ensuite, c’était un scénario… violent. Alors que tout le
système crie « Ne combats pas ! », beaucoup d’éléments
nécessitaient une confrontation. Il y avait aussi des éléments un peu
illogiques, par exemple, les anges renvoient normalement les gens qu’ils
touchent dans le passé mais ce ne fut pas le cas ici. Le comble pour un jeu
basé sur la franchise.
La préparation
Le scénario était linéaire, je l’ai dit. Cela signifie que
le scénario détaillait les scènes une à une, ce qui s’y passe, ce qui pourrait
s’y passer, etc. Du coup j’ai lu et préparé ma séance… scène par scène. C’est
bien, c’est pas comme si j’avais écrit un article où je me disais qu’il fallait que j’arrête de faire ça. Sur cette séance, et sur ce jeu de rôle je pense, ça m’a vraiment desservi.
Si les joueurs sont capables de transformer l’histoire, il faut toujours avoir
en tête le grand Tout, pas seulement zoomer sur la scène actuelle. C’est aussi
pour moi un défaut de ce scénario.
A cause de ce « fonctionnement », je n’ai pas
fourni au groupe des informations critiques à leur bonne compréhension de la
trame narrative. Et ce, alors qu’ils auraient dû y avoir accès, parce qu’ils ont été
ingénieux. Mais non, comme ils n’étaient pas dans la bonne scène, ils n’ont pas
eu les infos. Pire, dans la bonne scène, ils n’ont pas eu l’information non
plus car leurs précédentes tentatives n’avaient rien donné, donc ils n'ont pas réessayé. C’était dramatique.
J’ai aussi composé certains éléments à la volée et j’ai créé
de l’incohérence dans la trame narrative. Rien de grave mais tout de même, cela aurait pu être évité en partant du « grand Tout » puis en
détaillant les scènes. En l’occurrence, la date du vaisseau indiquait le XXIIe
siècle alors qu’il aurait dû indiquer le XXVe… sachant que les indiens allaient
leur dire qu’ils venaient du XXIIe. Une information simple, certes, mais ayant
beaucoup d’implications : par exemple, un problème temporel peut expliquer la raison pour laquelle le TARDIS les a emmenés là, d'où vient le vaisseau où ils sont, etc.
L’ambiance
Le résultat de tous les points ci-dessus sont que l’ambiance
fut un fiasco. Je voulais une ambiance assez pesante d’exploration parsemée de
tension, mais on était plus à la franche déconnade. La tension dramatique
ressemblait à un ballon qu’on a gonflé, dont on a pincé l’extrémité puis
relâché : des tentatives qui partaient dans tous les sens en faisant un
bruit de pet. Au final, je suis moi-même rentré dans le délire, il fallait une
ambiance, autant que tout le monde se marre.
Mais du coup… j’avais prévu quelques morceaux de la bande son de
Doctor Who… qui correspondait à mon ambiance initiale. Ce n’était plus vraiment
en adéquation. Néanmoins, ce petit effort a tout de même fait beaucoup et les
joueurs ont apprécié entendre la musique du Docteur qui allait parfois
parfaitement bien avec la narration.
Le téléphone
Franchement, j’hésitais à en parler mais je pense qu’il le faut.
Je n’avais jamais été confronté au problème avant ça. Que quelqu’un jette un œil
par-ci, par-là, rien de grave. Mais là mes joueuses ont passé la moitié
de la séance sur leur téléphone portable. Un peu sidéré, je n’ai pas réagi
durant la partie.
Quand j’en parle en fin de partie, elles me rétorquent que
ce sont des femmes et que du coup, elles peuvent faire deux choses en même
temps. Voire même qu’elles ne peuvent pas se concentrer sans faire deux choses
en même temps. Whaou.
L’espace d’un instant, je me suis remis en cause : j’ai
été incapable de les intéresser assez pour que j’aie toute leur attention. Mais
non, ça ne marche pas comme ça. Même si on suppose qu’un.e joueur.se puisse
conserver une pleine capacité d’attention durant la partie en faisant autre
chose en même temps (ce dont je doute férocement (oui, férocement)), c’est un
manque de respect envers ses joueurs et son MJ de faire cela. Ça m’a réellement
agacé.
Dans son livre Dirty MJ 2, John Wick parle de la situation et propose que quand l'un des joueurs sort son téléphone, il s'arrête de parler et le regarde fixement, en silence, jusqu'à ce qu'il le range. Il reprend alors le cours du jeu sans faire le moindre commentaire.
J'aime cette idée. On est (normalement) des adultes responsables, pas besoin de confisquer les portables à l'entrée.
Conclusion
Bon mais sinon, on en a pensé quoi de ce JDR Doctor Who ?
Ouais, carrément, je referais bien une partie à l’occasion.
D’ailleurs je ne sais pas si vous savez, mais j’aime bien
les gifs de Doctor Who.
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